Les mots du sexe d'après le dictionnaire d'Agnès Pierron
OEILLET
« L’œillet » = le trou du cul
Arthur Rimbaud évoque cet endroit « obscur et foncé comme un œillet violet » (Sonnet du trou du cul).
« Obscur et froncé comme un oeillet violet
Il respire, humblement tapi parmi la mousse
Humide encore d'amour qui suit la pente douce
Des fesses blanches jusqu'au bord de son ourlet.
Des filaments pareils à des larmes de lait
Ont pleuré, sous l'autan cruel qui les repousse,
À travers de petits caillots de marne rousse,
Pour s'en aller où la pente les appelait.
Ma bouche s'accoupla souvent à sa ventouse ;
Mon âme, du coït matériel jalouse,
En fit son larmier fauve et son nid de sanglots.
C'est l'olive pâmée, et la flûte câline ;
C'est le tube où descend la céleste praline :
Chanaan féminin dans les moiteurs éclos !
(album zutique, Verlaine + Rimbaud)
« Marc une béquille avait
Faite en fourche, et de manière
Qu’à la fois elle trouvait
L’œillet et la boutonnière
D’une indulgence plénière
Il crut devoir se munir,
Et courut, pour l’obtenir,
Conter le cas au Saint-Père,
Qui s’écria : "Vierge mère,
Que ne suis-je ainsi bâti !
Va, mon fils, baise et prospère,
Gaudeant bene nati. »
(Que se réjouissent les gens bien constitués !)
(Jean-Baptiste-Joseph Willart de Grécourt, XVIIIe)
L’œillet est complémentaire de la boutonnière, comme le pied de la chaussure, le poison de la nasse, l’oiseau de la cage.
On mesure le clin d’œil appuyé du vieux beau, qui s’exhibe avec un œillet à la boutonnière…
« un œillet rouge serré par l’orteil, couché nu sur le lit, Roger charmait un vieux Monsieur qui se déshabillait lentement devant la glace. Dans cette glace d’ailleurs nous vîmes ce spectacle : Roger d’un mouvement adroit portait son pied à sa bouche et saisissait l’œillet. Quand il eu quelques secondes humé, il le promena sous son aisselle. Le vieux était agité, Il s’embrouillait dans ses boutons, ses bretelles, et convoitait le jeune corps, habile à se couvrir de fleurs, Roger souriait.
- Tu est mon rosier grimpant, dit le vieux.
Avant qu’il n’ait commencé cette phrase, frétillant sous les draps, Roger se retourna sur le ventre et plantant l’œillet dans son derrière, la joue écrasant l’oreiller, il cria en riant :
- Et çui-là, tu viens le grimper. »
(Jean Genet, Journal du voleur, 1949)
« (…) il coulait ses doigts dans la raie et chatouillait l’œillet rose qu’il regardait de temps en temps en temps en écartant les hémisphères. »
(Theodoric Foulkes, Le Styx, 1975)
« « Bizarrement, il (Francis Ponge) ne dit à aucun moment que le mot œillet est diminutif d’œil (…). Il va aussitôt à des comparaisons de linge froissé et de crème fouettée, quelque chose de frisé, de fripé, de chiffonné, de déchiqueté (…). (…) puis (il) écrit de façon stupéfiante : « A les voir (les œillets), le plaisir qu’on éprouve à voir la culotte déchirée à belles dents, d’une jeune fille qui soigne son linge. »
(Philippe Solers, Le grand roman de l’érotisme florale, 2006)
Equivalent : La rondelle, l’entrée des artistes, l’œil de Gabès
« L’avoir dans l’œillet » = être baisé
S’emploie de manière métaphorique pour l’avoir dans le cul, dans l’os.
Il est intéressant de savoir que au XIXe, quand les contrats d’engagement n’existaient pas, un directeur de théâtre qui souhaitait se passer des services d’une comédienne, le lui laissait entendre en lui envoyant un bouquet d’œillets. Elle l’avait dans l’os, dans l’œillet….
En revanche, s’il prolongeait ses prestations, il lui faisait parvenir un bouquet de roses.
Moralité : n’offrez jamais des œillets à une comédienne.
« Butiner l’œillet » = faire une caresse bucco-anale,
Equivalent : baiser la rondelle, faire feuille de rose.